L'actualité de l'automobile est depuis quelques années en proie à des informations qui vont et viennent au fil des évolutions de la société. On ne sait comment on arrivera, demain, à conjuguer le monde de l'automobile et le respect de l'environnement tant l'équation est difficile : entre l'effort demandé à un monde de l’automobile déchu de son trône, et celui qui s'impose à la population, l'horizon ne semble pas se dégager. Entre le « y a qu'à » et le « oui, mais eux ? », on retrouve le 110 km sur autoroute, ressorti des limbes à la faveur d'un sondage et d'une tribune de presse...
Limitation de vitesse : le cas d'école des 80 km/h
Voilà un sondage qui fait du bruit car il est contre-intuitif. Rappelez-vous la mesure et le passage au 80 km sur les départementales; rejetés assez massivement par la population, créant un clivage dont la société française a le secret. Au final, le gouvernement s'est sorti d'affaire en laissant les départements faire le choix de conserver cette limitation ou de renouer avec les 90 km/h. Une grande partie d'entre eux est allée dans le sens de l'opinion publique en revenant à la limitation la plus haute.
Il est vrai qu'elle a été justifiée pour lutter contre la mortalité routière. Les chiffres ont été convaincants, plus de 349 vies sauvées selon un rapport gouvernemental mais, dans la foulée, un autre rapport de la Ligue de Défense des Conducteurs s'inscrivait en faux, allant même expliquer que rouler à 80 % aurait pu augmenter le taux de mortalité dans certains départements...
En résumé, la mortalité sur les routes était une cause moins tendance auprès du public que celle des 90 km/h.
La limitation de vitesse est donc devenue un drapeau rouge pour les autorités et pourtant, on entend parler d'une limitation à 110 km/h sur les autoroutes de l'Hexagone comme une éventualité ; rien que cela, c'est déjà une avancée.
Roulez à 110 sur autoroutes : les Français sont prêts?
C'est une étude menée par Elabe, un cabinet de conseil, qui vient jeter un pavé dans la mare : 68 % des Français seraient pour le passage à 110 km/h sur autoroute. Cette mesure avait été annoncée lors de la fameuse convention citoyenne de 2020, mais l’exécutif a préféré l'écarter, encore échaudé par les remous des 80 Km/h. Deux ans après, l'opinion publique aurait changé son fusil d'épaule. L’accélération des événements climatiques serait l'une des principales raisons à ce changement de paradigme.
Dans le même temps, une tribune dans le Parisien, signée aussi bien par le fondateur d'un site de covoiturage que par Cyril Dion, réalisateur et activiste pour l'environnement, demandait aux Français de ne pas attendre la loi pour baisser le pied. Les associations de défense des automobilistes ont été légitimement questionnées : elles ne sont pas pour, mais elles sont moins véhémentes, comme si elles commençaient à abandonner l'idée totémique que le concept de "limitation de vitesse"' était une castration insupportable de la liberté des automobilistes. Les temps changent.
Débat autour du 110 : pugilat annoncé ?
Le sondage tombé, la tribune publiée et les couteaux sont déjà tirés... On retrouve, évidemment, la guerre des chiffres avec d'un côté les « pour » qui expliquent que rouler plus doucement pollue moins, on vous expliquera pourquoi c'est plus économique. De l'autre, les "contres" qui dénoncent des chiffres exagérés.
Il faut dire qu'en ce moment : 20 % de réduction des émissions de CO2, et 20 % de carburant économisé, c'est une lune de miel entre l’économie et l'écologie. De plus, à 110 km/h, les batteries des voitures électriques verraient leurs autonomies sensiblement s'améliorer. Il est donc difficile pour ceux qui voient la liberté bafouée dès qu'on parle de responsabilité individuelle de faire feu de tout bois.
Pour une fois, la volée de bois vert se fait plus discrète et les opposants essayent d'apporter un peu de mesure à des chiffres qui peuvent paraitre pour le moins optimistes.
Le débat est donc finalement plus calme et plus argumenté.
Rouler moins vite est plus écologique : pas si simple
Dans le monde de l'automobile,entre autre, les chiffres sont discutables. Souvenez-vous de la consommation des véhicules calculée en chambre d'essai, avec un moteur posé sur un socle comme si la voiture roulait indéfiniment sur une route parfaitement droite et un sol idéalement plat. Est-ce que les chiffres étaient faux ? Absolument pas ! Par contre, ils ne reflétaient aucunement la réalité de l'utilisation quotidienne d'un véhicule.
Pour les études sur le 110 km/h, il est difficile de fournir des chiffres réalistes, car il existe de trop nombreuses variables. En effet, une voiture pour aller plus vite aura besoin de plus d’énergie, ne serait-ce que pour l’accélération et, donc, de plus de carburants, ce qui va impliquer une plus grande pollution. C'est un fait.
Un autre fait important, c'est que la vitesse d'un véhicule n'induit pas une plus grande consommation de carburants, mais les émissions polluantes sont elles proportionnelles à la consommation de carburants
On s’aperçoit que la vitesse est donc un facteur parmi d'autres. Un exemple simple : un coffre de toit, l'utilisation de la climatisation ou simplement, rouler, à 50 km/h en 5e qui vont engendrer une consommation excessive sans lien avec la vitesse. En résumé, il faut accompagner la réduction de vitesse sur autoroute par l'écoconduite afin d'en maximiser les effets pour l'environnement, mais aussi pour le porte-monnaie des automobilistes.
Pour conclure sur ce débat, on peut dire que les chiffres sur les économies de carburants et sur les émissions polluantes sont des moyennes, mais qu'une baisse de 20 km/h entraînera mathématiquement une baisse des émissions polluantes et des économies de carburants. Pour savoir si c'est 20, 15 ou 30 %, il est nécessaire de faire un calcul, à minima, par modèle.
Finalement, la question sous-jacente est bien plus simple : sommes-nous prêts à ralentir pour lutter contre le réchauffement climatique ? La réponse n'est plus forcément celle que l'on pourrait croire, rassurant non ?