Quand le conseil de l'UE annonce dans une hystérie collective la fin de la production de voitures thermiques en Europe, nous étions pour le moins étonnés. Non pas que ce n'est pas possible, mais cela semblait tellement hâtif, que la suspicion d'un effet d'annonce dont l’objectif est de stimuler aussi bien les constructeurs que la demande, sans oublier, les États semblait transpirer de cette annonce. Et on peut dire que cela a fonctionné, mais réel se fiche bien des promesses. Le réel obéit à deux maîtresses : la cause et les conséquences. Le monde n'est pas comme on voudrait qu'il soit et évidemment, on aimerait tous que les voitures ne soient plus la source de pollution que l'on connaît, que la solution pour remplacer le thermique soit bien plus respectueuse de l'environnement, qu'elles soient accessibles à tous. Ce n'est pourtant pas le cas. Quand en mars 2023, l'annonce est faite, les constructeurs sont tombés de leurs sièges, car on leur demandait de changer un outil de production, une technologie et un savoir-faire industriel en 12 ans alors qu'ils en étaient à une transition rapide, mais fluide, voire cosmétique. 2035, c'est dans 11 ans. 11 ans dans un plan industriel aussi considérable, ce n'est rien. Plus nous allons nous rapprocher, plus nous allons entendre un bruit de fond remettant en cause l'échéance... Et si en plus, le marché lui-même est atone, le bruit pourrait devenir assourdissant. Et de l'autre côté du Rhin
Les constructeurs Allemands moins enthousiastes
Les constructeurs allemands étaient plutôt satisfaits de cette interdiction en 2035. Leur engagement écolo n'est pas à remettre en cause, mais certaines mauvaises langues voyaient dans cette docilité, l'avance technologique qui leur permettait de transformer cette interdiction en opportunité de dominer le monde.
Cela peut étonner tellement la merveilleuse mécanique allemande a sorti des moteurs prestigieux et des modèles thermiques qui resteront à jamais dans l'histoire de l'automobile. On oublie trop souvent, nous les consommateurs, que les chefs d'industrie ne sont pas des romantiques. La romance, c'est pour vendre des voitures, alimenter le storytelling pour raconter de belles histoires. Évidemment aucun constructeur, même les plus exclusifs ont dit « nous arrêtons, nous ne voulons pas de ce monde où notre savoir-faire n'aura plus sa place ». Porsche, Mercedes et BMW ont vite compris que l'électrique serait l'avenir, certes imposé, et donc la condition sine qua non à leurs survies.
Les constructeurs allemands réticents ?
A les écouter depuis l'annonce de cette interdiction, ils semblaient plus que confiants, même si parfois, un petit tacle pouvait partir, mais c'était plus pour jouer les rebelles et émoustiller les fans des grosses cylindrés que pour remettre en cause l'interdiction. Les constructeurs allemands semblent revenir sur terre depuis que le marché ne répond plus aussi bien que prévu. Le marché mondial, notamment le marché européen, peut se prévaloir de bons chiffres en 2023, mais le ralentissement n'est pas de bon augure, car le marché est jeune. C'est assez simple : une croissance à deux chiffres n'est pas miraculeuse surtout quand elle est dopée par les aides d’État et portée par un message globalement universel. Par contre, ce qui inquiète le secteur, c'est que le ralentissement est déjà là comme si la demande commençait déjà à s’essouffler alors que le marché est loin d'être mature.
Et là, environnement ou pas, l'investissement considérable que les constructeurs allemands, et les autres, ont consenti pour transformer leurs lignes de production ne leur permet pas d'absorber une chute de la vente des véhicules électriques. Ce n'est pas un sentiment de peur ou une crainte, mais bien une réalité : Mercedes a diminué sa production, Audi a réduit la voilure, Porsche a laissé entendre que son objectif de 80% de voitures électriques en 2030 était un peu trop optimiste tandis que le PDG de Renault a laissé entendre que reculer l'interdiction serait bienvenu. La solution pour éviter ce marasme, c'est de continuer à vendre du thermique neuf, car le marché de l'automobile ne s'est jamais remis de la pandémie. Une nouvelle crise serait dramatique, alors, 2035 commence à paraître menaçant...
Vers un recul de l'interdiction de la production de voitures thermiques neuves ?
Les discussions semblent inévitables. En Allemagne, une partie de la droite conservatrice voudrait même faire annuler cette interdiction en prétextant qu'elle vient toucher un secteur stratégique de la nation et donc menacer l'avantage technologique et le savoir-faire d'une industrie capitale pour l'économie allemande, donc européenne. C'est vrai que l'approche des élections européenne semble le terreau de toutes les outrances et sonner l'hallali de toutes les nuances, mais le retrait de cette interdiction » semble improbable : il faudrait que l'Institution accepte de se dédire et de générer un mécontentement global dans les populations de l'Union européenne alors que parler d'un recul de la date butoir reste politiquement acceptable.
L'idée qui va prévaloir, c'est celle du consensus, car l'enjeu environnemental reste une préoccupation principale des usagers de la route, mais le quotidien et le pouvoir d'achat restent le nerf de la guerre. Par contre, une négociation sur la date de l'interdiction semble bien faire son chemin même si l'image de l'Union européenne prêtera le flanc aux attaques des populistes de tout bord.
Afin de rassurer tout le monde, la VDA vient de sortir un communiqué. L'association allemande des constructeurs indiquent que la date de l'interdiction ne changera pas. Cette annonce toute fraîche laisse entendre que les rumeurs qui ont filtrées sont fantaisistes ou alors, c'est justement parce qu'elles ne le sont pas, que le VDA s'est senti obligé d'intervenir...