Le permis de conduire des seniors revient avec fracas dans l'actualité. On l'avait laissé en mars 2023 avec la tragique histoire de Pauline Derouléde, victime des années auparavant d'un terrible accident de la route causé par une personne âgée de plus de 90 ans, confondant, sans doute, la pédale de freins et d’accélération. Si la violence du choc lui arrache la jambe gauche, c'est en militante de la sécurité routière qu'elle annonçait après un rendez-vous avec les huiles que le gouvernement allait prendre des initiatives durant l'été de la même année. Deux ans après, le dossier est resté en suspens : ce n'est certainement pas la parole de Pauline Derouléde qu'il faut questionner, mais bel et bien, ceux qui s'engagent à l'ombre des ors de la République et s'effacent à la lumière des projecteurs. Si la France semble avoir évacué la question aux calendes grecques, l'Europe revient sur le dossier et semble moins réservée que les États qui la constituent. Est-ce que l'UE parviendra à trouver un socle commun sur ce sujet cornélien où le législateur doit conjuguer sécurité routière, liberté de circulation, et tout cela, sans mettre à l'index une classe d'âge ?
Répondre au vieillissement de la population en Europe
Si l’Union européenne se penche sérieusement sur le sujet, c'est tout simplement pour harmoniser la loi dans les pays membres et faire face aux vieillissements de la population. La France est à des années-lumière du Portugal qui débute les contrôles des capacités à 40 ans jusqu'à 75 ans, âge butoir pour un renforcement des tests. Chez leurs voisins hispaniques, des tests débutent à partir de 65 ans tout comme chez les Grecs. En Scandinavie, l'âge de vérification est fixé à 70 ans. L'Union européenne voudrait imposer une législation commune sans provoquer une poussée de colère chez les seniors tout en évitant de pointer du doigt une population qui ne cesse de s’accroître : en 2050, les démographes estiment que la population de plus de 65 ans sera proche des 30 % contre 20 % aujourd'hui.
Cette prise de conscience n'est pas une lubie de Bruxelles, mais la conséquence d'une réalité simple : plus une personne vieillie, plus conduire est difficile sans que cela ne conditionne sa nécessité de se déplacer au quotidien. Nous pourrions nous dire que si cela fonctionne au Portugal et dés 40 ans (!), l'acceptabilité d'une loi par le grand public n'est pas illusoire. Le plus simple pour la classe politique française ne serait-il pas que la loi vienne de l'UE pour s'en dédouaner tout en la faisant passer quand même ? Cela pourrait expliquer pourquoi ce sujet n'est plus abordé depuis deux ans malgré le combat des militants. Alors l'Europe, elle dit quoi ?
Union européenne : L'art de ménager la chèvre et le chou
On pourrait également utiliser l'expression : marcher sur des œufs. Faire passer une législation contraignante est impossible d'un point de vue du droit européen tandis que proposer un règlement commun impose de prendre en compte les spécificités nationales et culturelles... En 2024, une proposition de loi sur un permis renouvelable a fait chou blanc. C'était pourtant plutôt malin puisqu'on évitait la stigmatisation d'une classe d'âge avec une sorte de contrôle continu qui aurait même pu permettre de déceler des incapacités avant 65 ou 70 ans.
Mais en réalité, c'est extrêmement contraignant à organiser et dans un pays comme la France où le permis est ad vitam aeternam, c'est l'assurance du chaos. Vous le savez bien en France, nation de la Fraternité, on est toujours pour quand c'est pour les autres. Au-delà de la plaisanterie, il est déjà difficile d'obtenir une date pour passer le permis désormais accessible à 17 ans. On imagine mal comme on arriverait à créer un test de conduite tout au long de la vie des conducteurs. Il y a également la proposition d'un contrôle médical tous les 15 ans jusqu'à 60 ans et ensuite tous les cinq ans. Finalement, l'Europe voudrait faire adopter une loi sur des permis valables 15 ans tout en encourageant l'autodiscipline des conducteurs. Mon Agence Automobile.fr n'est pas un bookmaker, mais on ne mettrait pas une pièce de la pire voiture que nous avons refusé sur l'adoption de cette loi. Pourquoi ?
Le permis de conduire reste une nécessité pour les seniors
Pour avoir la plupart de nos agences situées dans les périphéries et dans nos chères campagnes, nous savons que les personnes âgées qui conduisent le font par nécessité. Les enfants peuvent être loin, les seniors restent assez autonomes pour profiter d'une retraite bien méritée, mais par contre au volant, cela peut être problématique comme le démontrent les statistiques.
La réalité, et sans peindre un tableau à la Germinal, c'est la désertification ; de la route à faire pour se rendre chez le médecin, à la pharmacie ou simplement aller chercher le pain. La voiture est une question de santé, d'alimentation, mais c'est aussi un lien social. Qui va demander à nos anciens leurs avis ? Ils diront qu'ils n'ont pas le choix et qu'avec ou sans permis, ils conduiront. Conditionner le permis à l'âge est une question de sécurité routière fondamentale, mais pour trouver une réponse crédible, il faut avant tout trouver des solutions efficientes pour que l'autonomie et que le quotidien des seniors soient possibles, et cela, pas seulement dans les villes et les grandes agglomérations.